Le journal Les Echos de jeudi 16 avril 2020 raconte notre mobilisation

Les Echos 16 avril 2020 – Journaliste : Stéphane Frachet
Photo Alexandre Yagoubi Idrissi /Vlad

Les PME des respirateurs encaissent la pression

CENTRE-VAL DE LOIRE

Tête de file du programme sur les respirateurs artificiels, Air Liquide mobilise aussi une centaine d’ETI et de PME

Mobilisés. Dans le sillage des multinationales Air Liquide, PSA, Schneider Electric et Valeo, une petite centaine d’ETI et PME sont en première ligne pour riposter au coronavirus et produire 10 000 respirateurs d’ici à mi-mai, à l’instar du tourangeau Vlad, fabricant de packs batterie, et de deux entreprises de Romorantin, l’électronicien Emka et le mécanicien de précision et intégrateur AXE.

Ce programme industriel intervient dans un contexte d’accélération du secteur du matériel médical depuis le début d’année. « Notre carnet de commandes a quasiment quadruplé », témoigne Patrick Marionneau, PDG d’Emka, qui conçoit et assemble des cartes électroniques pour le respirateur T60 et le distributeur de gaz médicaux Vigie d’Air Liquide. Sa PME travaille aussi pour les éclairages médicaux de l’orléanais Maquet, lui-même très sollicité par les extensions d’hôpitaux. Sur ce segment particulier de l’électronique, Air Liquide a aussi fait appel à l’ETI française Eolane ainsi qu’à Valeo. « Nous n’avions pas la taille pour suivre seul une telle cadence. D’autant que nos autres clients attendent aussi leurs produits, notamment JCDecaux pour les prochaines stations Velib’ », explique le dirigeant d’Emka, qui a réalisé 19 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019.

Approvisionnement au ralenti

Dans ses usines de Pruniers-en-Sologne (Loir-et-Cher) et Noyant (Maine-et-Loire), près de 70% de l’effectif est au travail, dont 85 personnes en production. Mais l’électronicien a dû réduire à une seule équipe afin de tenir compte de l’approvisionnement au ralenti en composants et des salariés absents.

Les deux tiers des 400 salariés d’AXE (50 millions d’euros de chiffre d’affaires) sont au travail. « Au fil des jours, nous avons récupéré des volontaires, d’autant que la production de matériel médical en ce temps de crise est très mobilisatrice », précise Josh James, codirigeant de cette PME. Pour cette entreprise basée à Lisieux, à Besançon et en Roumanie, il s’agit de produire des supports intégrant des boitiers de commandes, et aussi l’assemblage du nouvel appareil du francilien Airinspace, qui purifie l’air des blocs opératoires et des salles de réanimation.

Chez Vlad, l’usine de Parçay-Meslay (Indre-et-Loire) n’a jamais fermé, et l’objectif de packs pour Air Liquide est passé de 3000 batteries par an à 8000 en deux mois. Pour encaisser ce violent à-coup de production Jean-Louis Jarry a pu compter sur ses salariés. Sur les 65 salariés, une vingtaine assure la production et la logistique sur site.

Robotisation à point nommé

Il a aussi tiré profit de l’accélérateur bpifrance financé par la région Centre-Val de Loire, auquel il vient de participer. « Nous avions réfléchi à la pérennité de la production, quelles que soient les circonstances. Et sans imaginer qu’une pandémie nous mettrait en danger, nous avons finalisé en janvier un investissement d’environ 300000 euros en robotisation, ce qui a considérablement accru nos capacités », se réjouit le dirigeant de cette PME de 18 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Reste une question de financement : les facturations sont en baisse alors que les commandes s’envolent. Il faut acheter les composants et matières premières et payer des salaires malgré des encaissements en recul. « Ce programme de respirateurs facilite les choses auprès des banquiers », se rassure Jean-Louis Jarry. « Je n’ai jamais mis ma trésorerie entre les mains d’un seul banquier, et je m’en réjouis aujourd’hui », se félicite de son côté Patrick Marionneau, ravi de pouvoir compter sur des lignes de crédit, et qui s’apprête à demander un prêt garanti par l’Etat. Le ticket Air Liquide devrait l’y aider.